Entretien avec Philippe Arraou – Tête de liste OSONS ensemble à l’élection du CSO : « Notre projet est de réunir le plus largement possible autour d’un projet réformateur. »
LPC : Quelles sont les raisons qui motivent votre nouvelle candidature ?
Philippe Arraou : Si j’ai pris la décision récente de proposer ma candidature à cette élection, c’est par réaction aux programmes des candidats déclarés qui ne m’ont pas semblé à la hauteur des enjeux de notre profession. C’est aussi parce que le mode de scrutin a changé et que dorénavant les élus nationaux ne seront plus obligatoirement issus des syndicats. Cela fait quatre ans que je ne suis plus syndiqué et je pense que la profession a besoin d’une représentation nationale plus équilibrée pour éviter que l’exécutif ne soit confié qu’à l’un ou l’autre des syndicats. Mon expérience me permet d’en arriver à cette conclusion avec quelques années de recul, mais aussi en ayant approfondi ma connaissance de la profession à l’étranger grâce à plusieurs mandats, dont celui au Board de l’IFAC, et enfin en observant le changement profond et rapide de notre société.
C’est donc un projet de réforme que je conduis, avec une formidable équipe de jeunes : plus des deux tiers sont des trentenaires et quadras et 40 % sont des femmes. Cette génération ne se reconnait pas dans l’action de nos instances, ni dans les oppositions syndicales insensées. Il faut passer à autre chose et je suis très touché que des jeunes aient ainsi envie de s’engager pour construire un nouveau modèle. Ils bénéficieront de l’expérience de 5 anciens élus de CRO et de 2 anciens présidents nationaux, puisque Michel Tudel m’accompagne dans ce beau projet, issus de l’un ou l’autre des syndicats ce qui est une façon de montrer notre volonté de rassembler. Nos anciens élus ne représentent que 15 % de la liste à comparer aux 70 % des listes des syndicats, ce qui en dit long. Notre projet est de réunir le plus largement possible autour d’un projet réformateur. D’où le nom « OSONS ensemble ! »
LPC : Selon vous, quels sont les grands défis pour notre profession dans les quatre ans à venir ?
P. Arraou :Notre profession est confrontée au même défi que celui de l’économie en général et de nos clients : évoluer avec son temps et savoir se remettre en cause. La transformation digitale secoue notre société et il est ingénu, ou irresponsable, de penser que nous allons maintenir notre rôle auprès des entreprises en ayant juste intégré dans nos cabinets des outils de dématérialisation. L’automatisation galopante va trouver son apogée avec la généralisation de la facture électronique. Nos missions auprès des TPE, qui constituent l’essentiel de l’activité de la grande majorité des cabinets sont visées, que ce soit pour la tenue des comptes ou pour le déclaratif. Il faut avoir le courage de le dire, mais personne n’en parle. Comment peut-on affirmer que l’esprit de l’Ordonnance de 1945 soit en phase avec la réalité de l’économie d’aujourd’hui, et surtout de demain ?
LPC : Quelles sont les grandes orientations de votre projet pour la profession ?
P. Arraou : Je propose d’oser porter un projet de réforme, et de le porter ensemble, c’est-à-dire toutes tendances confondues, au terme d’un travail collectif de grande envergure qui pourra s’étaler sur l’année 2021. Il s’agit de bien définir la place de l’Expert-comptable aux côtés des acteurs de l’économie. Notre profession a été conçue pour apporter de la sécurité, ce qui a autant de sens dans notre société contemporaine qu’aux lendemains de la guerre, mais qu’il faut adapter. Le point culminant de notre mission est la délivrance d’une Attestation, fruit d’un travail accompli dans le cadre de règles déontologiques et d’indépendance qui sont la force de notre profession. C’est donc la signature de l’Expert-comptable que nous voulons valoriser en développant son usage.
Nous proposons que l’établissement des états financiers relève obligatoirement d’un professionnel dans certaines situations. Les missions de conseil sont très en vogue dans les discours officiels mais la réalité de terrain est toute autre, et il faudra beaucoup de temps et d’efforts pour qu’elles remplacent la perte de chiffre d’affaires des missions traditionnelles. Nous voulons demander aux pouvoirs publics d’aller au-delà de la simple réserve d’activité afin que l’Expert-comptable soit davantage reconnu comme le pourvoyeur légitime d’information des entreprises. Par ailleurs, nous voulons étendre notre périmètre légal à une mission de diagnostic, afin d’engager la profession dans une dynamique de temps réel et même de prospective. Enfin, le statut de l’Expert-comptable doit être adapté à l’environnement de la « data », et je vais reprendre ma revendication ancienne d’un statut de « tiers de confiance numérique » : nous devons être incontournables, ce qui était l’esprit de l’Ordonnance de 1945 et qu’il faut transposer. En clair, notre objectif est le développement de l’activité des cabinets par le biais d’une reconnaissance plus affirmée.
LPC : Comment renforcer notre influence économique et politique afin d’éviter de subir les décisions ?
P. Arraou :Ce qui s’est passé avec la loi PACTE pour le commissariat aux comptes est l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire pour l’expertise comptable. La profession a sa part de responsabilité en n’ayant pas anticipé une évolution que l’on savait inévitable. La meilleure façon de ne pas avoir à subir une attaque et de se retrouver dans une position défensive, est d’être soi-même en situation offensive. C’est pourquoi je propose que ce soit la profession qui propose sa réforme aux pouvoirs publics et pas l’inverse. Quand on a en face de soi un interlocuteur qui est dans une démarche de réforme, il est opportun de se mettre dans cette même dynamique et de ne pas s’arcbouter dans une défense conservatrice vouée à l’échec : nous en avons eu plusieurs exemples en deux ans.
La profession a besoin d’une équipe entreprenante et forte, capable de porter des offensives et de se battre. Je suis convaincu que la prochaine mandature du CSOEC va être politique, et c’est ce qui me motive. C’est au Président qu’il revient de porter les projets et pas à des cabinets de lobby.
LPC : Comment améliorer ou transformer le fonctionnement de notre Institution pour servir mieux ses membres ?
P. Arraou : Les cotisations collectées par le CSOEC lui permettent d’investir à un niveau important avec une approche macro dans l’intérêt de toute la profession. C’est une réflexion stratégique et visionnaire qui doit guider les choix, et c’est la responsabilité de l’institution. à l’heure où la gestion de la data est devenue l’or noir de notre société, il me semble indispensable d’investir sur l’archivage et la protection des données des cabinets afin de réduire leur dépendance vis-à-vis des éditeurs. C’est une démarche que je souhaite entreprendre avec ces derniers afin de définir leur périmètre, car nous avons évidemment besoin d’eux. Un projet de cette envergure peut nécessiter beaucoup d’argent, ce qui n’est pas un problème depuis la revente de l’immeuble du CSOEC. Je propose donc d’engager un investissement massif au service de la profession pour sécuriser son entrée dans le monde digital.
Interview de Philippe Arraou – Tête de liste OSONS ensemble à l’élection du CSO
Entretien avec Philippe Arraou – Tête de liste OSONS ensemble à l’élection du CSO : « Notre projet est de réunir le plus largement possible autour d’un projet réformateur. »
LPC : Quelles sont les raisons qui motivent votre nouvelle candidature ?
Philippe Arraou : Si j’ai pris la décision récente de proposer ma candidature à cette élection, c’est par réaction aux programmes des candidats déclarés qui ne m’ont pas semblé à la hauteur des enjeux de notre profession. C’est aussi parce que le mode de scrutin a changé et que dorénavant les élus nationaux ne seront plus obligatoirement issus des syndicats. Cela fait quatre ans que je ne suis plus syndiqué et je pense que la profession a besoin d’une représentation nationale plus équilibrée pour éviter que l’exécutif ne soit confié qu’à l’un ou l’autre des syndicats. Mon expérience me permet d’en arriver à cette conclusion avec quelques années de recul, mais aussi en ayant approfondi ma connaissance de la profession à l’étranger grâce à plusieurs mandats, dont celui au Board de l’IFAC, et enfin en observant le changement profond et rapide de notre société.
C’est donc un projet de réforme que je conduis, avec une formidable équipe de jeunes : plus des deux tiers sont des trentenaires et quadras et 40 % sont des femmes. Cette génération ne se reconnait pas dans l’action de nos instances, ni dans les oppositions syndicales insensées. Il faut passer à autre chose et je suis très touché que des jeunes aient ainsi envie de s’engager pour construire un nouveau modèle. Ils bénéficieront de l’expérience de 5 anciens élus de CRO et de 2 anciens présidents nationaux, puisque Michel Tudel m’accompagne dans ce beau projet, issus de l’un ou l’autre des syndicats ce qui est une façon de montrer notre volonté de rassembler. Nos anciens élus ne représentent que 15 % de la liste à comparer aux 70 % des listes des syndicats, ce qui en dit long. Notre projet est de réunir le plus largement possible autour d’un projet réformateur. D’où le nom « OSONS ensemble ! »
LPC : Selon vous, quels sont les grands défis pour notre profession dans les quatre ans à venir ?
P. Arraou :Notre profession est confrontée au même défi que celui de l’économie en général et de nos clients : évoluer avec son temps et savoir se remettre en cause. La transformation digitale secoue notre société et il est ingénu, ou irresponsable, de penser que nous allons maintenir notre rôle auprès des entreprises en ayant juste intégré dans nos cabinets des outils de dématérialisation. L’automatisation galopante va trouver son apogée avec la généralisation de la facture électronique. Nos missions auprès des TPE, qui constituent l’essentiel de l’activité de la grande majorité des cabinets sont visées, que ce soit pour la tenue des comptes ou pour le déclaratif. Il faut avoir le courage de le dire, mais personne n’en parle. Comment peut-on affirmer que l’esprit de l’Ordonnance de 1945 soit en phase avec la réalité de l’économie d’aujourd’hui, et surtout de demain ?
LPC : Quelles sont les grandes orientations de votre projet pour la profession ?
P. Arraou : Je propose d’oser porter un projet de réforme, et de le porter ensemble, c’est-à-dire toutes tendances confondues, au terme d’un travail collectif de grande envergure qui pourra s’étaler sur l’année 2021. Il s’agit de bien définir la place de l’Expert-comptable aux côtés des acteurs de l’économie. Notre profession a été conçue pour apporter de la sécurité, ce qui a autant de sens dans notre société contemporaine qu’aux lendemains de la guerre, mais qu’il faut adapter. Le point culminant de notre mission est la délivrance d’une Attestation, fruit d’un travail accompli dans le cadre de règles déontologiques et d’indépendance qui sont la force de notre profession. C’est donc la signature de l’Expert-comptable que nous voulons valoriser en développant son usage.
Nous proposons que l’établissement des états financiers relève obligatoirement d’un professionnel dans certaines situations. Les missions de conseil sont très en vogue dans les discours officiels mais la réalité de terrain est toute autre, et il faudra beaucoup de temps et d’efforts pour qu’elles remplacent la perte de chiffre d’affaires des missions traditionnelles. Nous voulons demander aux pouvoirs publics d’aller au-delà de la simple réserve d’activité afin que l’Expert-comptable soit davantage reconnu comme le pourvoyeur légitime d’information des entreprises. Par ailleurs, nous voulons étendre notre périmètre légal à une mission de diagnostic, afin d’engager la profession dans une dynamique de temps réel et même de prospective. Enfin, le statut de l’Expert-comptable doit être adapté à l’environnement de la « data », et je vais reprendre ma revendication ancienne d’un statut de « tiers de confiance numérique » : nous devons être incontournables, ce qui était l’esprit de l’Ordonnance de 1945 et qu’il faut transposer. En clair, notre objectif est le développement de l’activité des cabinets par le biais d’une reconnaissance plus affirmée.
LPC : Comment renforcer notre influence économique et politique afin d’éviter de subir les décisions ?
P. Arraou :Ce qui s’est passé avec la loi PACTE pour le commissariat aux comptes est l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire pour l’expertise comptable. La profession a sa part de responsabilité en n’ayant pas anticipé une évolution que l’on savait inévitable. La meilleure façon de ne pas avoir à subir une attaque et de se retrouver dans une position défensive, est d’être soi-même en situation offensive. C’est pourquoi je propose que ce soit la profession qui propose sa réforme aux pouvoirs publics et pas l’inverse. Quand on a en face de soi un interlocuteur qui est dans une démarche de réforme, il est opportun de se mettre dans cette même dynamique et de ne pas s’arcbouter dans une défense conservatrice vouée à l’échec : nous en avons eu plusieurs exemples en deux ans.
La profession a besoin d’une équipe entreprenante et forte, capable de porter des offensives et de se battre. Je suis convaincu que la prochaine mandature du CSOEC va être politique, et c’est ce qui me motive. C’est au Président qu’il revient de porter les projets et pas à des cabinets de lobby.
LPC : Comment améliorer ou transformer le fonctionnement de notre Institution pour servir mieux ses membres ?
P. Arraou : Les cotisations collectées par le CSOEC lui permettent d’investir à un niveau important avec une approche macro dans l’intérêt de toute la profession. C’est une réflexion stratégique et visionnaire qui doit guider les choix, et c’est la responsabilité de l’institution. à l’heure où la gestion de la data est devenue l’or noir de notre société, il me semble indispensable d’investir sur l’archivage et la protection des données des cabinets afin de réduire leur dépendance vis-à-vis des éditeurs. C’est une démarche que je souhaite entreprendre avec ces derniers afin de définir leur périmètre, car nous avons évidemment besoin d’eux. Un projet de cette envergure peut nécessiter beaucoup d’argent, ce qui n’est pas un problème depuis la revente de l’immeuble du CSOEC. Je propose donc d’engager un investissement massif au service de la profession pour sécuriser son entrée dans le monde digital.
Écrit par Stéphane Raynaud – 30 octobre 2020